Avec l’intention de me former dans la chirurgie de la fistule obstétricale, j’ai pu me rendre du 12.5 au 1.6.2019, d’abord 2 semaines à Addis Ababa, Ethiopie, dans un hôpital dédié à cette pathologie depuis 60 ans, le Hamlin Fistula Hospital. Créé en 1959 par un couple d’urologues australien, conscient de l’importance du problème dans cette région, parti de rien, ils ont développé une institution qui n’a cessé de grandir, tant en excellence qu’en taille, avec actuellement 5 centres Hamlin dans le pays, répartis dans les principales régions, outre celui de la capitale. Cet hôpital a traité plus de 60000 cas de fistules et contribue à la prévention de ces pathologies en ayant formé des équipes de sages-femmes qui portent l’information jusque dans les centres ruraux éloignés. Pour un ordre de grandeur, l’Ethiopie ç’est 100 millions d’habitants, un des pays les + pauvre du globe, avec un revenu moyen /hab. de 200 dollars/mois (enseignants, médecins, militaire, police, tout ce qui dépend de la fonction publique). Hamlin est une fondation privée qui vit grâce à des donations de sources très diverses et du monde entier, actuellement beaucoup d’Australie et des USA.
La fistule obstétricale est ce qui est décrit dans la figure 1, tiré de la brochure éditée par la fondation à l’occasion de son 60ème anniversaire.


J’y ai été très bien reçu par une équipe sympatique, et un médecin-chef ethiopien, le Dr Fekade, uro-gynécologue et chirurgien de la fistule, après une formation complète en gynéco-obstétrique : compétent et habile chirurgien.
C’est une chirurgie parfois simple, parfois très compliquée, qui nécessite de bonnes connaissances en chirurgie vaginale, mais aussi en urologie et en en chir. colo-rectale. Elle demande une faculté d’adaptation, d’improvisation et de finesse dans le geste, tant il est vrai que ces fistules peuvent être très diverses, en taille, en localisation et en qualité de tissus qu’il s’agit de réparer.
En effet certaines de ces fistules peuvent exister depuis de nombreuses années, avec des tissus cicatriciels importants, de dissection parfois …ardue. Il peut aussi s’agir de récidive, les échecs n’étant pas rares, surtout si pratiqués par des gens de moindre expérience (ce qui est fréquent), et également de situations où 2-3-4 fistules peuvent coexister.. Le principe de base de cette chirurgie est de chercher à séparer les organes reliés par la fistule, la vessie du vagin, l’urètre du vagin, le rectum du vagin, et de refermer les organes ainsi séparés. Si la fistule a complètement séparé l’urètre du vagin, (fistule circonférentielle), il faut extirper le trajet fistulaire, reconstruire l’urètre distal restant et l’anastomoser à la vessie. Si la fistule est chirurgicale post CS ou HY, elle fera communiquer la vessie ou l’uretère avec l’utérus, et l’urine s’écoulera par le col. L’intervention sera donc abdominale, par mini-tomie, (il n’y a pas de laps et encore moins de robot !), adhésiolyse, repèrage de la fistule dans le Retzius, excision et séparation de vessie-utérus et fermeture des 2. Toute opération de fistule se solde par un test au Bleu, qui doit bien-sûr être négatif, sinon on y retourne ou on cherche l’autre fistule.

Chez Hamlin, les moyens diagnostiques sont assez poussés, avec US,urographie, ampli de brillance, CT, urétro-vésico-urétéroscopie ( !), grâce aussi à la présence d’une femme urologue allemande, remarquable, qui travaille là 8 mois/an depuis 5 ans, et dont les contacts avec ses collègues en Allemagne et avec Stortz lui permettent d’obtenir et d’être régulièrement approvisionnée en matériel de qualité optimale, rare dans ces contrées. Elle assure des traitements complexes de dérivation urétéro-coliques (Mainz pouch 1 et 2), des extractions de gros calculs enclavés dans le bassinet, en les repoussant et les libérant à l’aide de sondes urétérales (pigtail), et en les récupérant par néphrostomie et néphroscopie (!).
J’ai personnellement pu observer et/ou assister directement 5 de ces laparotomies complexes, et une dizaine de ces fistules par voie vaginale, simples ou compliquée ; j’ai pu participer à la démarche diagnostique, aux discussions de prise de décision, pré-ou per-opératoires, et réaliser la complexité possible de ces prises en charge. Hamlin s’est aussi attaché les services d’un chirurgien colorectal chilien, qui vient une sem/an pour des cas compliqués, qu’on identifie pour lui et qu’on lui prépare.
La globalité de cette prise en charge fait de cette institution un modèle, que les hôpitaux gouvernements n’arrivent souvent pas à égaler, faute de matériel (gants, stérilisation déficiente, aspiration, coagulation…). Les médecins en formation de spécialité sont reçus régulièrement chez Hamlin pour des stages de 1-2 mois, qui leur sont bien-sûr comptés dans leur cursus.

Après ces 2 semaines de prise de contact avec cette pathologie en Ethiopie, dans de bonnes conditions, je me suis rendu en Ouganda pour une 3ème semaine, à Mbarara, ville de 1 million d’habitants, à 6h de route au sud- ouest de Kampala. Il y a là un hôpital universitaire, de soins généraux, comprenant un département de soins de fistules et gynécologiques. Ce département est dirigé par un médecin ougandais, gynéco-obstétricien, chirurgien très expérimenté en traitement des fistules , qui avait organisé un « camp » de formation pour des résidents, auquel il avait invité une de nos collègues de Winterthur, la Dre Verena Geissbühler, uro-gynécologue et chirurgien du prolapsus. Suite à des contacts que nous avions pris ensemble en 7.2018, à la IUGA de Vienne, elle m’a pris dans sa valise, et j’ai pu ainsi continuer dans l’approche de ces pathologies.
Le paysage change : on est en hôpital gouvernemental, avec les restrictions budgétaires que cela implique.
Les moyens diagnostiques sont beaucoup plus pauvres : anamnèse ( vous perdez de l’urine ?, depuis le combientième accouchement ? depuis quand ? quel est votre âge ? vous contrôler gaz et selles ? status (TV, repérage de la fistule si possible, cicatrices de CS, depuis quand ?), et hop, au programme op. dès qu’une place est disponible. Le diagnostic se fera sur la table op, en rachianesthésie, et la stratégie opératoire est réfléchie à ce moment. Grâce à l’expertise du chirurgien, les choses se passent bien, et des reconstructions, même compliquées, se font sur décision immédiate.
J’ai ainsi asssté une reconstruction d’une fistule vésico-vaginale avec une béance de 5 cm de diamètre du vagin vers la vessie,
permettant de voir les orifices urétéraux : sondage urétéral bilatéral par pigtail, à vue, séparation de la vessie du vagin, repérage du l’urètre distal sur sonde, complètement détaché de la vessie, fermeture de la vessie, néo urètre, avec anastomose à la vessie, test au Bleu. On complète par un Ingelmann-Sundberg avant la fermeture du vagin. Pas mal !


J’ai pu opérer moi-même une fistule urétro vaginale simple, 4 fistules recto-vaginales avec sphinctéroplasties, et assister à une douzaine d’autres réparation de fistule. Il n’y a pas d’instrumentiste, chacun prépare son plateau avec des sets déjà prêts, cherche ses fils, et ses écarteurs (pour les sacro-spino fixations), il n’y a pas de coagulation, pas d’aspiration… La lampe frontale remplace assez souvent le scialytique, panne de courant. On se lave 3 minutes avec une savonnette, retour à Semmelweiss.
Passionnant, passionnant, un autre monde ! avec des pathologies sévères, touchant des femmes jeunes, à qui on redonne une vie.
Je vais poursuivre dans cette voie
René Rottenberg
Dianuro, centre médical spécialisé en Périnéologie
La périnéologie est la spécialité médicale qui traite les troubles fonctionnels des trois régions du périnée : urinaire, vaginale et ano-rectale. Fort d’une équipe complète de spécialistes, Dianuro assure le traitement harmonisé de l’ensemble des affections de la sphère périnéale : incontinence urinaire, incontinence des gaz ou des selles, prolapsus génitaux (hernies génitales), constipation, hémorroïdes, fissures, diminutions de la sensibilité, douleurs et difficultés sexuelles.
Notre équipe multidisciplinaire est à votre service